Merci Thérèse pour cet émouvant témoignage en l'honneur de tes bébés tragiquement disparus.
Et je vois dans les yeux de mon très vieux copain, entre les arcs en ciel aux dix milles trésors quelques mots qu'en secret il ne donne qu'à moi :
« Après moi, va, aime en un autre, vis une autre histoire, ne gâche pas tout cet amour qui bat en toi.
Je sais que tu ne m'oublieras jamais ... »
Nous pourrons, de toute notre logique, de toute la force qui murmure en nous, imaginer qu'un jour notre compagnon s'enfuira pour un paradis canin fait de vertes prairies et d'éternelles chasses, mais, toutes nos certitudes, toutes nos illusions de force, se briseront d'un coup juste pour un vieil os oublié ou une place cruellement vide auprès de notre fauteuil.

On se dira alors, pour se rafistoler, qu'il est mieux là où il est, redevenu lumière et ces pleurs qui monteront seront pour le Merci d'avoir été aimée, d'avoir été vivante ... Merci d'avoir brisé ces lois scientifiques qui nous ont fait humains et nous ont séparés des choses et des êtres, mais surtout d'avoir retrouvé l'espace d'une vie par les ponts de l'amour ce chemin qui s'étiole entre les bêtes et nous.

Drôle de terme d'ailleurs pour désigner ces animaux qui, tout comme nous, sont parvenus à notre ère au travers des quelques 350 millions d'années qui nous précédent, avec leurs solutions propres et nous survivraient si nous ne les entrainions pas dans notre destruction.

Mais nous sommes, pour l'instant, les maîtres du monde, les plus évolués, les plus intelligents ... les responsables !

Du moins le crions-nous fort, le démontrant sans cesse, nous attaquant sans crainte aux forêts équatoriales ou à la fission atomique, que nous finissons par nous croire.

Et soudain nous voici terrassée parce que dans nos bras lourds repose, encore tiède, le corps d'un animal. Et cette solitude qui nous racle le cœur est autant due à cette impuissance devant l'irrémédiable éternité qu'au vide tant béant qu'une bête comblait.

Cet amour lumineux qui tout d'un coup s'éteint nous surprend d'avoir pris une aussi grande place.

Cette fourrure épaisse où la main se perdait nous laisse dans les doigts des morceaux de mystères après avoir pu tant aimer s'être donnée sans fard et juste pour soi même avoir été aimée et ces plaisirs communs fabriqué d'un regard d'un battement de queue, d'un battement de cœur et garder tout en soi comme un secret avec l'unique certitude d'avoir touché du doigt une loi de ce monde, la seule qui justifie ... celle d'avoir partagé.

Alors un peu plus vieille, alors un peu plus lourde, on pense à la magie de deux êtres qui passent et s'attardent un instant pour ne plus être seule ... quand il part, notre pot' ou que nous quitte cette discrète confidente, nous restons abasourdie, voutée sous la peine et placée par le vide.

Puis un matin voilà que l'on se sent plus fort, comme plus riche encore ... bien plus qu'un souvenir, ils nous laissent autre chose au-delà du regret, comme un nouvel espoir, comme si de leurs yeux avait coulé de l'or mais plus beau et plus grand que la jaune ferraille à nous rendre brillant et peut-être plus fier.

Astaffort le 20 septembre 2006

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