Le Basset Fauve de Bretagne est la variété « ras de terre » d'une race .plus vaste, celle des Fauves de Bretagne, qui est elle-même l'une des plus anciennes de France, puisqu'elle est connue depuis François 1er, comme l'atteste cette citation de Jacques du Fouilloux : « Il est à présumer que les Chiens Fauves de Bretagne sont les anciens chiens des ducs et seigneurs de Bretagne, desquels M. l'amiral d'Annebault et ses prédécesseurs ont toujours gardé la race, laquelle fut premièrement connue au temps du grand roi François. »
Au XIVe siècle, un certain Huet des Ventes avait déjà une meute de chiens de ce type, dont on sait par ailleurs grâce à de nombreux ouvrages du XVIe siècle qu'il figurait parmi les trois grands groupes originels de chiens courants : les Chiens Blancs dits « du Roy », les Gris de Saint-Louis et les Fauves de Bretagne.
A l'heure actuelle, la race des Fauves de Bretagne se subdivise en deux variétés: les Bassets et les Griffons. Il y en eut longtemps une troisième, celle des Briquets, mais elle n'est plus reconnue depuis l'Exposition nationale d'élevage du Fauve de Bretagne qui eut lieu à Fougères en 1980. Sage décision malgré tout, car il valait mieux s'attacher à renouveler et à développer le cheptel des Griffons et des Bassets plutôt que de maintenir artificiellement une variété intermédiaire qui n'aurait fait que nuire aux deux autres.
Le Basset est de loin le sujet le plus répandu, même si la popularité des Griffons va croissant depuis quelques années. Griffon et Basset ont les mêmes caractéristiques pour ce qui est de la forme de la tête, de la texture du poil, de la couleur, du port du fouet. Le Basset se distingue essentiellement par ses pattes anormalement courtes. Véritable accident génétique à l'origine (le « bassétisme »), cette malformation rend le chien particulièrement apte aux déplacements dans les fourrés et les broussailles, ce qui explique que des éleveurs, souhaitant s'adjoindre un compagnon de chasse adapté à des terrains difficiles comme ceux des landes et des forêts bretonnes, l'aient encouragée et fixée.
En dépit ; ou peut-être en raison même ; de son ancienneté, la race des Fauves de Bretagne avait presque disparu, il y a quarante ans, de la région où elle est née. C'est pour cette raison que fut créé en 1949, sous l'impulsion de M. Lessard, président de la Société canine bretonne, et du comte Jean de Pluvie, le Club du Briquet Fauve de Bretagne, qui se donnait entre autres pour mission de protéger et de faire connaître ces chiens menacés d'extinction, il s'agissait alors surtout du Briquet et du Basset, dont le spécialiste de l'époque était M. Mascaro.
C'est à M. Marcel Pambrun, successeur de M. Lessard à la Société canine bretonne, aujourd'hui disparu, que l'on doit la reconnaissance nationale des Fauves de Bretagne. Mettant au service de cette cause toutes ses compétences de louvetier et de juge, il réussit à faire renaître un élevage de qualité dont on mesure le niveau aux récompenses obtenues : deux coupes de France sur lapin, puis, en 1980 à Vérone, lors de l'Exposition mondiale de la Fédération cynologique internationale, le Prix du meilleur chien courant à Mick, un Basset Fauve de Bretagne.
Les premiers Bassets Fauves de Bretagne ont été élevés pour la chasse à tir et la chasse à courre des petits animaux, en particulier du lapin, dans les ronciers et les fourrés bretons. C'est pourquoi la plupart des sujets ont longtemps gardé une taille minimale, Mais avec la raréfaction du petit gibier, due pour une bonne part aux ravages exercés par la myxomatose, les chiens courants furent de plus en plus utilisés pour chasser tous les gibiers. Ce phénomène a créé une demande de Bassets Fauves de Bretagne plus hauts sur pattes, dotés d'antérieurs droits, d'autant plus que la race, « exportée » de sa province d'origine vers d'autres régions, était de plus en plus appelée à travailler sur des terrains différents de ceux auxquels elle était habituée jusque-là. Le Club de la race a donc été amené à décourager les pattes torses et à admettre une taille plus grande.
L'idéal se situe entre 32 et 38 cm, avec une tolérance de 2 cm en plus pour les sujets exceptionnels, Force est de reconnaître qu'il s'agit là d'un grand maximum, car, au-delà, l'animal n'a plus grand-chose du Basset. En 1979, Marcel Pambrun pouvait ainsi écrire : « En ce qui concerne le Basset Fauve, la race est maintenant bien fixée, Il faut cependant produire le maximum de sujets ayant des pattes droites, éviter qu'ils soient longs (il faut rappeler que le Fauve de Bretagne est le plus court de nos Bassets), et à poil trop ras. » Le poil doit en effet être demi-long, dur, dense, presque ras, plat, et en tout cas jamais soyeux ni frisé. Bel exemple d'adaptation de la faune à la flore, puisque ce poil court est particulièrement commode pour la course dans un pays de fourrés coupé de hauts talus et hérissé d'ajoncs. Il convient de noter que les oreilles, quant à elles, sont recouvertes d'un poil beaucoup plus doux et plus fin.
Si l'on se reporte à la nomenclature présentée par le professeur Denis de l'Ecole nationale vétérinaire de Nantes à la Commission zootechnique de la Société centrale canine, une seule classe de fauve doit être admise pour la robe : fauve rouge ou fauve orangé, quelquefois marqué de blanc; la présence d'une tache blanche au poitrail peut être tolérée, comme du reste celle de quelques poils blancs sous le ventre, mais elle n'est pas à rechercher. De même, on préfère ne pas voir de blanc entre les doigts et au bout de la queue. La nuance de la robe, unicolore, peut aller du froment doré à l'acajou, en excluant le noir et le charbonné. Il y a quelques années encore, le froment semblait l'emporter. Aujourd'hui, on voit de nouveau beaucoup de chiens foncés. Il apparaît quelquefois encore des poils noirs, résurgence sans doute de la robe des Teckels à poil dur utilisés en retrempe voici une cinquantaine d'années. La truffe doit être noire ou brun foncé, avec, comme le dit le standard, des « narines bien ouvertes ». Les ongles devraient également être noirs, mais les ongles clairs ne sont pas éliminatoires, non plus que la tache blanche à la poitrine et la truffe tabac.
Il faut signaler que la truffe se décolore quelquefois à la belle saison pour se recolorer l'hiver et, du reste, que la teinte du poil peut varier légèrement pendant la mue. Ces différences occasionnelles de pigmentation ne sauraient toutefois encourager les éleveurs à « aller au ladre », c'est-à-dire à produire des sujets pré- sentant une dépigmentation. Les Britanniques n'ont jamais accordé beaucoup d'importance à ce défaut (qui doit être considéré comme un caractère inesthétique plutôt que comme un signe de dégénérescence), ce qui ne veut pas dire pour autant qu'ils le cautionnent: on n'a pas encore vu un sujet à la truffe trop pâle gagner à Peterborough.
A maintes reprises, les Bassets Fauves de Bretagne ont été croisés avec des Bassets Griffons Vendéens. On estimait l'alliance utile pour augmenter le format du chien breton, et surtout pour calmer son tempérament particulièrement fougueux. Mais cette retrempe n'est plus préconisée actuellement, car la tête du Basset Fauve de Bretagne ne doit pas être celle du Basset Griffon Vendéen. D'ailleurs, tout rappel du Vendéen sur ce point exclut le Basset Fauve de Bretagne du qualificatif « excellent »; Le crâne est plutôt allongé avec une bosse occipitale marquée. Il a l'aspect d'un plein cintre surbaissé, avec cette particularité qu'il diminue de largeur jusqu'au niveau des arcades sourcilières, qui ne sont pas très accusées. Le museau est peu chargé en babines, assez sec, ce qui ne veut pas dire qu'il soit pointu. Quant aux oreilles, elles sont attachées au niveau de la ligne de l'œil, donc assez haut, comme chez les Briquets. Bien moins longues que celles du Vendéen, elles se terminent en pointe.
La poitrine doit être cerclée tout en ayant de la longueur. Le rein doit être large, soutenu, rectiligne. Le flanc doit être plein et le ventre « non relevé ». Les cuisses seront bien musclées, sans que l'animal soit trop lourd, car il reste un chien de fonction, un chien d'utilisation qui doit pouvoir courir sans avoir trop de « viande » à transporter.
Les membres antérieurs sont quelquefois légèrement tors, mais il faut exiger que cette torsion soit symétrique, condition sine qua non pour assurer un bon équilibre. De plus, il convient de s'assurer que ce quart de torsion n'entraîne pas une mauvaise application du pied sur le sol, ce qui constituerait un handicap physique sérieux. Le fouet, enfin, est généralement porté gaiement. Gros à la base, pas très long, il s'effile bien vers l'extrémité.
L'élimination progressive des tares héréditaires de la race à laquelle ont procédé les éleveurs, sans pour autant mettre en péril la diversité génétique due à une base de sélection large, permet de prédire un excellent avenir au Basset Fauve de Bretagne. D'autant que le Club, conduit par de véritables chasseurs comme Marcel Pambrun, Louis Petro ou plus récemment Bernard Vallée, a puissamment contribué à faire connaître la race partout en France et à l'étranger, notamment en Hollande, en Italie et en Espagne.
Les Bassets et les Griffons Fauves de Bretagne ont le même caractère. Leurs ancêtres communs chassaient le loup; ce sont donc des chiens braves, ardents, courageux, voire téméraires à l'attaque. Ils sont fins de nez, et ils résistent à l'eau et au froid. Très actifs, ils chassent gaiement et crient bien sans être bavards, avec des voix assez brèves, des voix de « cogneurs ». Ces animaux vifs et dont l'aptitude au fourré n'est plus à démontrer ont de tout temps remporté un franc succès auprès des chasseurs de lièvres et de lapins, mais ils ont également su s'adapter parfaitement à des types de gibier et à des modes de chasse nouveaux pour eux, notamment à la chasse à tir, car ils ont l'œil, l'oreille, et, détail important en pareilles circonstances, ne craignent pas les coups de fusil.
Seul petit défaut du Basset Fauve de Bretagne, mais qui ne le rend sans doute que plus attachant: une certaine tendance ; pour ne pas dire une tendance certaine ; à l'indépendance. Trait de caractère bien naturel chez ce « chien breton, issu d'une province à laquelle il ressemble », pour reprendre la jolie formule de Bernard Vallée à qui sera laissé le dernier mot : « Si ces chiens sont par nature des chiens de chasse ou de vénerie, et s'ils ne peuvent être transformés sans dommages en chiens de compagnie tout au long de l'année, ils s'avéreront d'excellents compagnons, affectueux et doux avec les enfants. » |